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Le monde réel

Lettre d'information
septembre 2000
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— PLPL. Le Monde Réel —

Plusieurs ouvrages et films ont confirmé ces dernières années que les médias étouffent l'esprit critique pour mieux installer l'idéologie qui favorise les intérêts des dominants. La bataille contre ces connivences ne peut être uniquement menée de manière ponctuelle. Elle réclame son journal.
Pour lire pas lu pourrait être ce journal. À vous d'en juger le contenu.

Son ambition? Exposer les falsifications de chaque instant pour ruiner l'idéologie du patronat dont la presse est le vecteur. PLPL ne sera pas un nouveau média contribuant à l'imposture du pluralisme dans une société de marché.
Ce n'est pas un hasard si PLPL a fait son apparition publique à Millau, où près de 10 000 exemplaires du numéro zéro ont été diffusés. Le journal était en effet chez lui au milieu des militants anticapitalistes : sa diffusion par abonnement ne lui imposera pas de passer des compromis avec Matra-Hachette (actionnaire des NMPP et propriétaire des Relais H); son refus de toute
publicité lui garantira une liberté rédactionnelle et financière totale. Enfin, son refus de servir de rabatteur à la gauche plurielle lui permettra de critiquer ceux qui, depuis quelques mois, semblent découvrir les infamies de la mondialisation néolibérale mais en épargnent les agents : gouvernements de droite ou de « gauche », institutions économiques internationales, OTAN, etc.

Le 30 juin, en direct de Millau, Daniel Mermet (« Là bas si j'y suis », France Inter) a invité Pierre Carles (réalisateur de Pas vu, pas pris) Thierry Discepolo (responsable des éditions Agone) et Serge Halimi (auteur des Nouveaux chiens de garde), tous trois animateurs ou sympathisants du collectif PLPL, à en commenter ce premier numéro. Après avoir rappelé l'absence d'une presse critique et indépendante, puis alerté contre les « spécialistes en récupération », les intervenants ont souligné que « si le ton du journal peut paraître vif, c'est que la violence quotidienne de
l'adversaire est tellement banalisée qu'elle peut se donner un air affable : l'accord conclu entre la CFDT et le Medef sur l'Unedic montre pourtant que sa brutalité demeure ».

Le sort de PLPL est entre vos mains. Faute d'un nombre suffisant d'abonnés, cette nouvelle publication périra. Et nous serons tous condamnés à vivre avec les mêmes médias...

Gratuit, le numéro zéro est intégralement en ligne.
Les suivants ne le seront pas.

Nous comptons sur votre abonnement :
100 F pour 10 numéros.
Règlement à l'ordre de PLPL, envoyé à :
PLPL, BP 114, F-30010 Nîmes Cedex 4.

Les paiements ne seront débités que si le nombre d'abonnés est suffisant pour lancer le journal. Ceux qui souhaitent diffuser le numéro zéro de PLPL peuvent demander des exemplaires en écrivant à l'adresse indiquée ou en envoyant un courrier électronique à [email protected].
Vous connaissez des gens susceptibles d'être intéressés : envoyez-nous leurs coordonnées et nous leur ferons parvenir le numéro zéro de votre part.

    

 
Quelques réponses aux premières réactions
  

PLPL a déjà suscité un abondant courrier. La majorité des lecteurs se félicitent du ton et du fond du journal. Néanmoins, deux objections sont revenues à plusieurs reprises.

Anonymat.

« C’est bien joli de balancer mais avant de donner suite à un abonnement éventuel, j’aimerai savoir : qui êtes-vous ? »… « Il est inacceptable d’écrire de manière anonyme »… « Il n’est pas très correct de critiquer “les nouveaux chiens de garde” (critiques, au demeurant, fort justes) et de ne pas se présenter »… « Pourquoi avez-vous écrit PLPL sera collectif ou ne sera pas » (page 1) ?

Un journal qui informe sur les médias, qui n’a pas les moyens de rémunèrer ses collaborateurs, qui pour informer sur les médias fait appel à des journalistes soit salariés permanents soit pigistes, ne peut fonctionner s’il fait prendre à ses collaborateurs le risque de perdre leur emploi. La question ne se pose pas dans des termes fondamentalement différents pour les syndicalistes, universitaires, artistes, etc., qui, en critiquant nommément un grand journal influent, pourraient s’exposer à la vindicte de ce journal (campagne de presse) ou prendre le risque d’être boycottés par lui lorsqu’ils lanceraient une initiative syndicale (grève, appel) ou culturelle et scientifique (colloque, publication d’un ouvrage, d’une revue).

     L’anonymat est d’ailleurs revendiqué par deux publications aussi différentes que Le Canard enchaîné et The Economist. Dans le premier cas, les échos publiés en page 2 (la plus lue) ne sont pas signés – s’ils l’étaient, ils se tariraient bien vite, aucun homme de pouvoir n’étant disposé à sacrifier sa carrière pour le simple plaisir d’informer. Les articles de l’hebdomadaire britannique The Economist ne sont pas signés non plus, à la différence des éditoriaux. Et là, l’anonymat est explicitement revendiqué comme une marque de refus du vedettariat et comme l’affirmation d’une responsabilité collective.
     Toutefois, conformément à l’obligation légale relative aux parutions périodiques, le numéro un de
PLPL aura un directeur de publication, qui sera Pierre Carles.

     

un journal doit prendre
le risque de mordre la main
de celui qui le lit...

         

Philippe Val et Charlie Hebdo.

Certains lecteurs ont critiqué la manière dont PLPL a qualifié Philippe Val de faux-impertinent au même titre que Durand, Field et Schneidermann :
« Je suis très attristé que vous mettiez Val dedans [les faux-impertinents] »… « Charlie continue à manifester chaque semaine la même diversité dans ses opinions »… « Les opinions de Val sont assez dures quelquefois à défendre mais… est-ce qu’il faut pour cela englober la totalité du journal ? »… « C’est grâce à Philippe Val que la campagne de soutien à PVPV a été une réussite »… « J’ai été choquée de la façon dont vous avez dénoncé publiquement Philippe Val [dont] chaque semaine j’apprécie la sensibilité, l’humanisme et l’ouverture d’esprit »… « Charlie c’est quand même pas Le Figaro ».

Alors, pourquoi critiquer Philippe Val ? Au fait, pourquoi pas ? Un dossier sur les faux-impertinents du moment n’en aurait pas été un s’il avait oublié Philippe Val. Ses prises de position favorables à la guerre de l’OTAN au Kosovo et à Daniel Cohn-Bendit n’ont-elles pas été contredites par certains collaborateurs de Charlie Hebdo eux-mêmes ? Depuis, Philippe Val n’a pas émis la moindre autocritique, au contraire. Au moment de la guerre du Vietnam, un partisan des bombardements américains n’aurait jamais réussi à se recaser ensuite dans le camp de la contestation. L’espèce d’indolence et d’amnésie qui caractérise la presse française, y compris lorsqu’elle se proclame contestataire, n’aura pas sa place dans PLPL.
     Quant aux relations entre
Charlie hebdo et son patron, nous ne sommes pas certains qu’une forme de « diversité d’opinions » soit nécessairement une bonne chose dans un journal contestataire. Certains sujets appelent une réaction unanime. La guerre de l’OTAN au Kosovo appartenait à ce registre, tout comme le soutien à Daniel Cohn-Bendit. À contrario qui justifierait qu’un rédacteur de Charlie hebdo soutienne le projet de « refondation sociale » du Medef au nom de la diversité d’opinion ? La presse radicale ne doit pas avoir peur de contester radicalement les décisions portées par le pouvoir.
     Par ailleurs, Philippe Val n’est pas
Charlie hebdo. Ainsi, ce n’est pas lui mais Gébé et Olivier Cyran (respectivement président et vice-président de l’association Pour voir pas vu) qui ont soutenu Pas vu pas pris, le film de Pierre Carles. Tandis que Philippe Val affirmait que Pierre Carles, « malhonnêtement… racontait des conneries » (entretien à Rouge).
     C’est parce que ses mots comptent que Philippe Val devrait réflechir à ceux qu’il choisit. C’est parce que son soutien au pouvoir est plus dangereux que celui des médias discrédités que nous devons être doublement vigilants. Et lorsque ce qu’il écrit offre une caution contestataire à des points de vue conservateurs, si
PLPL ne le dit pas, qui le dira ?
L’attachement individuel, affectif, à un personnage public ne doit jamais conduire à négliger sa responsabilité sociale.
     Concernant Philippe Val lui-même, les citations que
PLPL a rappelées sont troublantes quels que soient leurs contextes. Tellement troublantes pour l’une d’elles, que dans le même numéro de Charlie hebdo, loin de prétendre « Il n’y a pas de démocratie sans marché », Oncle Bernard affirmait « Le marché hait la democratie. »
     Au demeurant, le rédacteur en chef d’un journal aussi strictement hierarchisé que
Charlie hebdo a plus de poids que celui d’un simple collaborateur.
     De la même manière, on est en droit de s’attendre, chez un éditorialiste aux références savantes, si habile à rationaliser ses prises de position, qu’il propose un autre modèle de compréhension que la compassion pour « une petite grand-mère à bout de souffle, allongée en travers du chemin », qu’il dispose de plus de recul historique que celui de lire « un journal en remplaçant “Kosovar” par “Juif” » pour conclure que tous ceux qui ne soutiennent pas les bombardements de l’OTAN sont « les équivalents de Céline, de Drieu La Rochelle [ou] des communistes solidaires du pacte germano-soviétique. »